nid de chenille processionnaire - St Crépin le 19/11/2015
nid de chenille processionnaire - St Crépin le 19/11/2015
procession de chenilles
procession de chenilles
Papillons adultes. ©entomart
Papillons adultes. ©entomart
urticaire par contact avec des poils de chenilles processionnaires. Source: INRA
urticaire par contact avec des poils de chenilles processionnaires. Source: INRA

 

La processionnaire du pin.

Claude Casenave. Décembre 2014


L'année 2014 a été marquée par l'apparition de nombreux cocons blancs dans les pins. On en a remarqué beaucoup autour du lac de Serre-Ponçon, mais aussi sur le territoire de la Roche-de-Rame jusqu'ici relativement épargné.


Ces cocons sont construits par les chenilles d'un papillon de nuit, la processionnaire du pin (Thaumatopoea pityocampa) , qui se mettent ainsi à l'abri du froid de l'hiver. Grâce à cette protection, les chenilles de processionnaires du pin résistent à des froids intenses, jusqu'à – 16°C. Le réchauffement climatique fait que ces températures sont maintenant rarement atteintes, même en altitude et de ce fait la processionnaire du pin peut proliférer et remonter vers le nord de la France, atteignant maintenant la région parisienne, et aussi s'étendre en altitude jusqu'à plus de 1000 m.

Or cette prolifération pose deux ordres de problèmes :

  • d'abord sur le plan forestier, en entraînant un ralentissement de la croissance des arbres infestés, et une dégradation esthétique dans les parcs et jardins.

  • ensuite un problème de santé humaine et animale, lié au caractère urticant et allergisant des poils des chenilles.


Le cycle de vie des processionnaires du pin :


Les papillons sortent de leurs chrysalides à la fin de l'été et s'accouplent immédiatement. Le mâle meurt tout de suite. La femelle ne survit que deux ou trois jours, le temps de pondre ses œufs en fourreau autour de rameaux de pins. L'éclosion a lieu cinq à six semaines plus tard. Les jeunes chenilles se nourrissent la nuit des aiguilles de pin proches et s'abritent le jour dans des cocons provisoires peu visibles. Quand la nourriture vient à manquer la colonie de chenille émigre plus haut sur l'arbre. Elles se déplacent toujours en procession, la tête de l'une touchant la queue de la précédente, en se guidant sur un fil de soie dévidé au fur et à mesure du déplacement. On peut lire avec intérêt à ce sujet les souvenirs entomologiques de Jean-Henri Fabre. Les chenilles muent trois fois avant l'hiver. A ce stade elles ne sont pas encore urticantes. A la quatrième mue les chenilles construisent un abri plus solide, le cocon blanc que l'on remarque bien dans les arbres. Au printemps, les chenilles qui ont survécu à l'hiver se rendent, en procession, vers le sol, où elles creusent pour s'enterrer à quelques centimètres de profondeur et se transformer en chrysalides. A l'été le cycle recommence, à moins que les conditions climatiques soient mauvaises. Dans ce cas les chrysalides peuvent rester enterrées et vivantes plusieurs années.


Pathologies liées à la processionnaire du pin :


Les chenilles deviennent urticantes après la troisième mue. Ce sont des poils fins et nombreux de l'extrémité caudale qui se détachent facilement de la chenille, et qu'elles peuvent même projeter si elles sont agressées, et qui peuvent être emportés par le vent qui sont responsables (les poils longs, bien visibles sont inoffensifs). Ces poils sont dentelés comme des harpons et se fixent donc facilement sur la peau et les muqueuses. Très fragiles ils se brisent et libèrent une substance, la thaumatopoeine, qui est irritante et allergisante. Ceci entraîne divers troubles chez l'homme et plus souvent encore chez les animaux :

Urticaire et démangeaisons au niveau de la peau ; au niveau de la bouche oedème inflammatoire de la langue, pouvant aller jusqu'à la nécrose de celle ci ; au niveau des yeux, conjonctivite, voire, si des poils ont pénétré profondément, uvéite qui peut aboutir à une diminution importante de la vision, voire une cécité ; au niveau des voies respiratoires, démangeaisons, toux, bronchospasme.

Les animaux les plus exposés sont les jeunes chiens et les chevaux.Chez les ovins qui ont brouté de l'herbe contenant des poils de chenille, on peut observer des lésions buccales pouvant être confondues avec celles de la fièvre aphteuse.

Le traitement repose d'abord sur la prévention du contact avec les poils des chenilles : protection vestimentaire quand on cherche à détruire les nids. Pas de séchage du linge à l'extérieur dans les zones très infestées. 

Lorsque le contact a eu lieu il ne faut pas frotter, mais laver pour enlever les poils sans les briser, ou les enlever avec du papier collant.

En cas d'atteinte oculaire l'avis d'un ophtalmologiste est indispensable : il pratiquera un lavage de l'oeil très prolongé après anesthésie locale et pourra repérer et enlever les poils restants sous microscope.

Enfin lorsque les lésions sont constituées, on utilise des antihistaminiques et des anti-inflammatoires stéroïdiens.




La lutte contre les processionnaires du pin est difficile.


En cas d'infestation localisée, dans un jardin par exemple, le plus simple est de couper et brûler les branches atteintes, en prenant les précautions nécessaires pendant l'opération : vêtements couvrants, masque, lunettes.

La lutte biologique est basée sur des pièges à phéromones, attirant les papillons mâles et diminuant de ce fait les accouplements. On a aussi utilisé les pulvérisations aériennes de produits à base de Bacillus thurigiensis. Ce produit est respectueux de l'environnement car il persiste très peu après application, et, s'il n'est pas spécifique des processionnaires du pin, si l'application se fait en hiver où la chenille processionnaire est pratiquement la seule active, il ne tue pas les autres papillons.

La lutte écologique apparaît la plus intéressante : diversification des plantations forestières afin d'éviter la monoculture des pins ; mise en place de très nombreux nichoirs à mésange, un des principaux prédateurs des chenilles.

Cette lutte doit être très persévérante pour obtenir des résultats.

En ce qui concerne la Roche-de-Rame, la solution la plus efficace, mais non contrôlable, serait la survenue d'une période prolongée de grand froid qui tuerait les chenilles dans leurs cocons.